“Chief happiness officers” ou responsables du bonheur au bureau sont les nouveaux métiers qui ont fleuri ces dernières années dans les entreprises.
Chargés de la qualité de vie au travail, de préserver l’équilibre vie privée, vie pro, et du bien-être des employés, ces managers du bonheur ont-il vraiment un impact sur les risques psycho-sociaux ?
Le bonheur au travail est-il un mythe ?
Mythe n°1 :Le concept de bonheur au travail est identique à la satisfaction dans son travail.
Bien que ces deux termes soient étroitement liés, il existe une différence essentielle dans leur interprétation. La satisfaction au travail est souvent un facteur influencé par l’entreprise, qui fait en sorte de créer des circonstances favorisant la satisfaction des employés.
Le bonheur au travail est, en fait, un facteur dont les employés eux-mêmes sont principalement responsables. Des études montrent que si la corrélation entre la satisfaction au travail et la productivité est très faible, il existe clairement une corrélation positive entre le bonheur au travail et la productivité.[1]
Mythe n°2 : La réalité du bonheur au travail n’est garantie que si vous avez un travail qui vous enthousiasme.
Est-il impossible d’être heureux si vous avez un travail ennuyeux ? Non.
L’environnement de travail n’est pas le facteur le plus important qui influence votre bonheur.
La façon dont vous pensez et agissez est bien plus importante. Elle détermine le niveau de plaisir, d’épanouissement et de sens que vous tirez de votre travail et de votre vie, et elle est totalement indépendante de votre environnement de travail particulier.
Mythe n°3 : Pour que vous soyez heureux au travail, tout doit être parfait.
Certaines personnes pensent que le bonheur au travail signifie l’éradication de tous les sentiments négatifs. C’est faux.
Le bonheur au travail signifie que la balance penche en faveur du positif et que vous avez le sentiment de faire quelque chose de valable.
Cependant, même lorsque tout va bien, nous avons parfois besoin de sentiments négatifs, car ils servent d’avertissement lorsque les choses risquent de mal tourner.
Les émotions négatives contribuent aussi à favoriser le changement.
Le problème se pose lorsque l’on reste bloqué dans ces émotions négatives, car le sentiment d’impuissance qui en découle est très malsain. L’augmentation du stress, du burn-out et des risques psycho-sociaux au cours des 20 dernières années montre qu’il s’agit d’un problème important.
Mythe n°4 : Le bonheur au travail et le bonheur dans votre vie personnelle sont deux choses distinctes.
Le bonheur au travail ne peut être séparé du bonheur dans votre vie en général.
Les personnes qui sont heureuses au travail sont clairement plus heureuses dans leur vie en général.
Lorsque vous tirez du plaisir et du sens de votre travail, cela a clairement un effet positif sur votre niveau de bonheur général. Et vice versa, bien sûr.
Mythe n°5 : l’art du bonheur au travail se résume-t-il à de la nourriture gratuite et autres avantages?
Ce mythe est surtout répandu dans les start-ups, mais il existe une idée reçue selon laquelle la nourriture gratuite au bureau ou d’autres avantages rendent les employés heureux.
Steve Moore, directeur des opérations de ressources humaines chez Insperity[2] , l’a bien dit :
« Si une pizza tous les vendredis est un excellent avantage, cela ne changera probablement pas la satisfaction générale d’un employé si ses besoins fondamentaux ne sont pas satisfaits en premier lieu ».
Ces avantages ont tendance à entrer dans la catégorie « rémunération » et, selon la personne recrutée (âge, secteur d’activité, etc.), les avantages peuvent avoir une signification très différente d’une personne à l’autre. La nourriture et les « perks » ne sont donc pas une solution miracle pour attirer et retenir les talents, mais ils peuvent contribuer à leur donner envie de venir travailler et améliorer la qualité de vie au travail.
Voici pourquoi les employés restent vraiment :
- Opportunité : Y a-t-il un avenir pour moi ici pour grandir et devenir plus performant ?
- Responsabilité : Que suis-je en train de faire aujourd’hui ? Est-ce que cela m’enthousiasme ?
- Environnement : Est-ce que j’aime mes collègues ? Est-ce que je me sens bien de travailler pour cette entreprise ?
Comment commencer à promouvoir le bonheur au travail dans votre organisation ?
Vous pouvez commencer à parler du bonheur au travail avec vos collègues, vos managers ou vos employés.
L’idée du « bonheur au travail » correspond-elle à leur façon de penser et correspond-elle à leurs intérêts et besoins ?
Une fois cette première étape franchie, vous êtes prêt à plonger un peu plus dans le vif du sujet : Dans quelle mesure sont-ils heureux au travail ? Un rapide scanner du bonheur au travail peut faciliter cette tâche.
Il est conseillé d’entamer des conversations 1 à 1 pour introduire le sujet auprès des équipes.
Parler du bonheur au travail est différent de parler des performances, de l’engagement ou des congés maladie. Les gens doivent se sentir libres et en sécurité pour parler du bonheur au travail.
Et vous ne pouvez pas forcer les gens à s’occuper de leur bonheur au travail. Mais si l’autre est prêt à s’intéresser à ce sujet, l’impact sur l’individu, l’équipe et l’organisation peut être immense. Des personnes qui prennent en main, de leur propre initiative, la question du bonheur au travail et une organisation qui facilite cela peuvent créer une spirale positive puissante qui génèrera beaucoup d’énergie positive.
Que votre entreprise soit petite ou une marque mondialement connue, le bonheur des employés est une chose qui évoluera toujours.
Mais, malgré tout, il existe des aspects du travail qui donneront toujours aux employés le sentiment de faire un travail utile. Ces aspects doivent être inscrits dans l’ADN de votre entreprise, de sorte que, quels que soient les avantages, le salaire ou la technologie de bureau, vos employés viendront au travail inspirés et déterminés à avoir un impact.
La place de l’animal humain dans le bonheur au travail
Cette question peut paraître surprenante car nous avons du mal à nous définir comme des animaux tellement ce terme peut sembler péjoratif. Pourtant, c’est une réalité sur le plan de la physiologie comme de l’évolution et cela a des incidences fortes sur nos comportements et notre niveau de bien-être.
Par exemple, la première chose dont l’animal que nous sommes a besoin est de sécurité. Cette sécurité est rendue premièrement possible par l’existence d’une tribu sur laquelle on peut compter et qui se révèle structurante et encadrante. On peut se demander que devient la tribu quand elle est éclatée aux 4 coins de la France et qu’elle se contacte seulement par écran interposé. Peut-on d’ailleurs même encore parler de collectif ?
La dimension de l’alignement entre ce qui est montré, exprimé, ressenti et pensé est essentielle aussi. En effet, il n’y a pas pire qu’un manager qui prend une position physique qui ne colle pas avec l’émotion qu’il exprime et qui diffère de sa façon de réfléchir comme des valeurs qu’il prône. Ce désalignement ne peut créer que de la frustration, de la colère ou de la méfiance.
Le respect et la mise en cohérence de cette dimension animale sur un plan personnel, interpersonnel et systémique constituent l’enjeu majeur des prochaines années qui s’ouvrent devant nous et cela pour nos sociétés comme les entreprises.